Array ( [slug] => parcoursd [slugex] => des-papiers-qui-ne-laissent-pas-de-marbre-- )
// Add the new slick-theme.css if you want the default stylingÀ la fois utiles et ornementaux, les papiers décorés sillonnent l’histoire du livre et de l’imprimé. On les découvre avec surprise sur une reliure ou en ouvrant un livre ancien.
Le terme « dominotier » apparaît au XVIème siècle. Il désigne alors un fabricant ou marchand d'images, de papiers décorés utilisés dans certains jeux. D’abord peu courante, la dominoterie connaît son apogée au XVIIIème siècle lorsque les papiers dominotés sont utilisés pour couvrir les livres.
Ces papiers présentent des motifs estampés, c'est à dire imprimés généralement à partir d'une planche de bois gravée, essentiellement géométriques ou floraux et souvent mis en couleur.
Ces papiers sont initialement utilisés pour tapisser différents objets mais aussi pour orner les murs des habitations ou des boutiques. Cet usage, très longtemps limité aux catégories modestes de la société, s'étend aux couches plus privilégiées. Cependant, les dominotiers français ne savent pas répondre à cette nouvelle demande contrairement aux papiers anglais qui semblent mieux s’adapter aux attentes d'une clientèle raffinée.
La reliure devient alors un autre débouché pour le papier dominoté qui est utilisé en couverture des livres ordinaires. Il est vendu à la feuille pour un prix dérisoire. Rappelons que, jusqu’au début du XIXe siècle, le livre reste un produit très couteux réservé à une clientèle fortunée. La plupart des livres se trouvent brochés sur les étals des imprimeurs-libraires, c’est-à-dire sans reliure, « quasi nus », ou, dans le meilleur des cas, avec une reliure d’attente, un cartonnage simple qui protège l’ouvrage en attendant une véritable reliure.
Préparées à l’atelier par le dominotier, les couleurs sont composées de pigments naturels liés avec de la colle de peau ou d’amidon, de la gomme arabique ou de la poudre d’alun. La gamme chromatique est limitée : noir, bleu, jaune, rouge. Ces couleurs se déclinent en différentes nuances selon le mélange des ingrédients.
Le papier dominoté, qui a surtout été utilisé pour la couverture de livres brochés, ne doit pas être confondu avec le papier marbré qui était contrecollé à l’intérieur de la reliure.
Nés au XIIe siècle en Extrême-Orient, les papiers marbrés apparaissent en Occident à la fin du XVIème siècle. En France, on attribue au relieur du roi Louis XIII, Macé Ruette, « la mode » de l’utilisation de papier marbré appliquée sur le contre-plat du livre puis sur les gardes volantes, c’est-à-dire les pages précédant la page de titre et les pages situées à la fin de l’ouvrage après l’achevé d’imprimé, avant que cette double page de garde marbrée ne se généralise dans la seconde moitié du XVIIe siècle.
La marbrure est obtenue par application de poudres de différentes teintes reposant sur un bain d’huile et d’eau. On crée alors des variations avec un ustensile (par exemple un bâtonnet ou des peignes) puis on applique une feuille de papier que l’on retire assez vivement. Une fois enlevée, les dessins apparaissent sur la feuille. Le papier prend alors l’aspect d’un marbre polychrome.
La possibilité des marbrures et motifs est infinie. D’ailleurs, la forme de ces motifs permet souvent de dater la reliure elle-même, puisque chaque époque a son style en ce domaine. Fin XVIe et durant tout le XVIIe siècle, on rencontre majoritairement des marbrés en peignés fins ou petits peignés, avant que le motif de la feuille de chêne ne se popularise.
Au XVIIIe siècle, on rencontre surtout des papiers marbrés à la coquille (tourniquet ou escargot), le principe du décor est de former de grosses gouttes de couleurs à la surface de l’eau et de leur donner un mouvement circulaire avec un bâtonnet, façon « coquille ». Le caillouté est utilisé dès les années 1620 et réapparaît au milieu du XVIIIème siècle.
Les arts de la dominoterie et de la marbrure, popularisés en Europe surtout au cours des XVIIe et XVIIIe siècles, ont su traverser le temps et sont toujours pratiqués par de nombreux artisans. Le fonds ancien de la médiathèque de Valence conserve de nombreux documents restaurés par l’atelier Hubert, installé à Lyon. Ci-dessous, les papiers de reliure de Marie-Claire Hubert : les papiers dominotés sont peints à la feuille et la pièce de titre est placée sur le plat de la reliure.
Tous ces documents sont consultables sur place en salle de lecture Archives-Patrimoine – site Latour Maubourg (horaires d’ouverture : 9h-17h du lundi au vendredi).