Array ( [slug] => parcoursd [slugex] => les-emprunts-nationaux-et-le-financement-de-la-guerre )
// Add the new slick-theme.css if you want the default stylingLe conflit qui frappe l’Europe en 1914 surprend par sa durée, la France n’avait en effet pas prévu qu’il s’installe durablement. Il devient alors difficile pour les gouvernements des nations belligérantes de financer la guerre. La Triple Entente (France, Empire Russe et Royaume-Uni) n’est pas soumise à un blocus maritime comme ses ennemis, mais son économie tourne au ralenti du fait de la mobilisation des hommes actifs. La France doit beaucoup importer, ce qui creuse son déficit.
L’Etat français accroit son contrôle sur les finances du pays et met en place plusieurs solutions pour amasser des fonds : emprunt auprès d’autre pays, adoption de l’impôt sur le revenu en 1917 et de l’impôt sur les bénéfices de guerre (c’est un impôt extraordinaire prélevé sur toute personne/entreprise ayant fait des bénéfices depuis l’été 1914, officiellement il permet de lutter contre les « profiteurs de guerre »), émission de bons de la défense nationale etc.
Une de ces solutions est l’emprunt de la défense nationale, utilisée dès les premiers temps de la guerre. Il s’agit d’une dette financière à long terme de l’Etat auprès des citoyens qui y souscrivent.
Il y aura 4 campagnes d’emprunts nationaux durant la Première guerre mondiale : novembre 1915, octobre 1916, octobre 1917 et octobre 1918. Les taux proposés sont très intéressants, pour inciter les personnes restées à l’arrière d’y souscrire. Ils sont payables en argent, en bons du trésor et même en coupons d’emprunts russes pour celui de 1918, dans la plupart des établissements bancaires. Cet effort économique mobilise énormément les administrations locales.
On estime que les emprunts nationaux ont rapporté 55,6 milliards de franc-or, dont seulement 24 milliards d’argent « frais ». Malgré cela, à la fin de la guerre, la dette de la France s’est creusée de près de 140 milliards de franc-or.
Pour inciter les Français qui ne sont pas au front à souscrire aux emprunts nationaux, les gouvernements mettent en place une véritable politique de propagande. Le medium le plus favorable à cela est l’affiche, placardée en grand nombre au lancement de chaque emprunt et souvent réalisée par des artistes célèbres.
Deux buts sont ainsi poursuivis : financer la guerre et mobiliser la société et les esprits en faisant pression sur la population civile. Cette dernière a en effet peu de nouvelles du conflit, la censure de la presse et des courriers des soldats intervient dès le début de la guerre, les reportages sur le front sont rapidement interdits. On ne transmet que les avancées de l’armée française et on passe sous silence les défaites, les conditions de vie dans les tranchées et les dégâts causés par l’armement moderne. Cela permet de contrôler les esprits et d’éviter une éventuelle révolte des citoyens à l’arrière et sur le front.
Pour impliquer malgré tout, les civils et les enjoindre à verser leur or, on développe avec les affiches une iconographie savamment travaillée. Il faut qu’ils secondent le sacrifice physique des soldats sur le front, et pour cela on fait vibrer leur corde patriotique.
Les publicitaires utilisent des symboles forts et facilement compréhensibles par la population, pour traduire des messages simples. Ces affiches véhiculent 3 idées maîtresses : la cause défendue est juste, les ennemis sont l’incarnation du Mal et la victoire est proche et certaine. Il faut en effet glorifier la patrie tout en dénigrant l’ennemi.
Ainsi les deux principaux belligérants sont régulièrement représentés par des allégories : la France est un poilu, Marianne ou un coq, tandis que l’Allemagne est un aigle ou un soldat avec un casque à pointe, vaincu ou au contraire menaçant. Lorsque le soldat français est présent, c’est souvent dans une posture héroïque ou à l’assaut d’une tranchée ennemie. On retrouve aussi l’image de l’Alsacienne en habits traditionnels, enchaînée ou au contraire libérée par la France du joug des Allemands.
- BECKER Jean-Jacques, Victoires et frustrations, ed. Du Seuil, 1990
- Collectif, La Drôme et la Grande Guerre : un département du front de l'arrière, Libel, 2015
- VALLAUD Pierre, 14-18 : la Première Guerre mondiale, Acropole, 2008